QUAND IL PÈTE IL TROUE SON SLIP ! 


« QUAND IL PÈTE IL TROUE SON SLIP », CHANSON DANS LE VENT !
(D’aucuns trouveront que mes deux derniers billets d’humeur stagnent dans la moiteur des slips, qu’ils exhibent sans pudeur la face cachée de la lune. Le slip a le vent en poupe, il est en odeur de sainteté au fil de l’actualité, qu’y puis-je ?)
Or donc 

« QUAND IL PÈTE IL TROUE SON SLIP » CHANSON DANS LE VENT !

 

« Quand il pète il troue son slip » Humour de fond de culotte ? Que nenni ! Tout un programme ! Que dis-je un programme ! Une profession de foi !
Ces paroles de Sébastien Patrick, pasticheur de Patrick Sébastien (vous mordez l’astuce ?) constitueraient-elles le fleuron de l’exception culturelle française ?

 

Qui ne se souvient avec émotion de la fantastique « danse des canards » toute auréolée de ses « coin coin » ou de « la chenille » la plus ponctuelle du hit parade puisqu’elle part toujours à l’heure ? Qui a oublié le très convivial « viens boire un p’tit coup à la maison » et son corollaire l’inénarrable « J’ai bien mangé j’ai bien bu » qui précèdent le cultissime « bo le lavabo » (sans doute pour se laver les mains après les libations précédentes) ? Mais si : « bo beau beau, il est beau le lavabo… » Ça y est, vous-vous souvenez ? Le dénommé Lagaf’ avait improvisé cette chanson par dérision, annonçant qu’il allait faire un N°1 du Top 50 et que croyez vous qu’il arriva ? La chanson devint un « Tube » ! 

 

Si la France peut légitimement s’enorgueillir des œuvres évoquées, « Quand il pète il troue son slip » gravit pourtant un degré de plus sur l’échelle de Richter de l’ascension intellectuelle des citoyens. Cette fière devise pourrait constituer le refrain d’un hymne révolutionnaire. « Le petit bonhomme en mousse » n’a qu’à bien se tenir ! Il peut faire tourner les serviettes tant qu’il veut, jamais il n’atteindra à la sobriété syntaxique qui donne toute sa vigueur à cette assertion : « Quand il pète il troue son slip ». La pureté de la phrase doit entretenir l’insomnie de nombre d’écrivaillons qui se torturent l’esprit pour enfanter des paragraphes emberlificotés et redondants tandis qu’en une courte phrase l’auteur génial condense toute la puissance corrosive de sa pensée.

« Quand il pète » : la menace qui gronde, qui émane, sous-jacente et sous-cutanée, sous cul tanné aussi, n’en est pas moins brutale et terrifiante. Ce Quand signifie que l’acte peut se perpétrer à tout instant. Que le slip se le tienne pour dit : l’épée de Damoclès (le pet de Damoclès en l’occurrence) peut le transpercer lorsque bon lui semble. Le pet d’après repas risque de sonner le glas, le trépas d’un honnête slip qui ne méritait pas une telle fin. L’injustice du désordre naturel s’exprime pleinement, judicieusement évoqué dans cette déclaration qui ajoute l’humiliation à l’anéantissement. Si le reste de la chanson n’est pas en reste quant à sa haute teneur philosophique, ce « Quand il pète il troue son slip » répétitif - puisqu’il en constitue le refrain – confine au sublime. Tout y est là exprimé : la fragilité, le caractère tragiquement éphémère de la condition humaine. Le pet incarne l’aveuglement du hasard, l’aléa tragique qui peut à tout moment faire basculer une vie dans les abysses du néant. Le slip figure l’humain en proie aux affres de l’existence, prête à le carboniser sans préavis. Quant aux verbes employés, ils expriment tous deux la violence aveugle, irrémédiable. Le il pète évoque la déflagration originelle, on y comprend : le « Big Bang », directement associé au trou noir qui en résulte. La vigueur de la métaphore laisse à penser que L’être et le néant, de Jean-Paul Sartre, constituait les prémices inabouties de cette œuvre essentielle, accomplissement ultime de la pensée philosophique : Quand il pète il troue son slip.

De toute évidence, Quand il pète il troue son slip s’affirme bien comme l’aboutissement incontesté de l’exception culturelle française. Louons donc la richesse et la diversité culturelles de notre mère patrie qui permet à des œuvres aussi accomplies que celles citées précédemment : la danse des canards, la chenille, viens boire un p’tit coup à la maison, J’ai bien mangé j’ai bien bu et bo le lavabo d’accéder à la postérité. Gageons que le très subtil Quand il pète il troue son slip sera, lui aussi, promis à perdurer longuement dans la mémoire collective de notre cher beau pays auprès des Molière et autres Voltaire ou Rousseau… dont l’auréole intellectuelle pâlira cependant à côté d’un tel chef d’œuvre.  

Admirons l’habileté de l’auteur qui se réfugie sous le label du pastiche pour mieux transmettre son précieux enseignement. 
Louons aussi la fantastique clairvoyance intellectuelle de nos concitoyens qui ont su, derrière son aspect de banalité tant anodine que scatologique, décrypter le profond message philosophique et propulser cet hymne à la Sagesse en tête des chansons les plus écoutées du moment !

Il semble évident que d’aussi avisés citoyens, anticipant l’alarme écologique lancée par la planète, afin de mieux s’accorder à la nature, regrimperont aux arbres d’ici la fin du XXIème siècle pour ne plus jamais en descendre. Avertis comme ils le sont, ils en oublieront le langage et pourront enfin péter tout leur saoul dans les branchages sans que l’écho de l’ironie vienne les perturber. Notez que les plus vigilants s’entraînent déjà à la vie dans les arbres lors de stages qui se disent ludiques et écologiques mais sont en fait initiatiques à la condition future de l’humain.
Quand tout sera tu, la planète retrouvera l’harmonie originelle, celle de la nature « insouillée » par les turpitudes des hommes. Le pet se sera évaporé, le slip putréfié et l’humain retrouvera ses origines, humble primate parmi les primates, enfin dépouillé de son inhumaine humanité.

Mais j’interromps là mon discours car l’entièreté de mes dires est implicitement contenue dans ce parangon de la pensée humaine :
Quand il pète il troue son slip.

​Tout est dit.

 


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